Une exposition de photographies de Dihia Taleb
Sacrées femmes est une série que j’ai débutée en Algérie durant l’année 2016. Entre Alger, Oran, et la grande Kabylie. Il s’agit d’un récit sur la femme et l’espace en Algérie. Le mien en l’occurrence.
C’est une notion que je n’avais encore jamais questionnée avant de quitter mon pays. De retour en Algérie, je me suis spontanément plongée dans une longue période d’introspection et de questionnement. Je me suis très vite attelée à un exercice d’identification des espaces possibles et permis, pour les femmes, et dans une sacralisation de l’intime, des rencontres, et de la solidarité.
Il y en a bien – des espaces – qui sont à conquérir par les femmes. À ses risques et périls. Mais si ces espaces regorgent de créativité et de vie, il y a, à contrario, un prix à payer : garder le silence. Déjà petite j’évoquais ces règles implicites. Je les avais intégrées tout naturellement, apprises par mimétisme, avec les femmes qui m’entouraient. Mais l’expérience de l’exil les a chamboulées.
J’entretiens ce dialogue interne, et ces questionnements, en cherchant l’intimité des quotidiens dits banals. J’ai photographié en jonglant avec des soucis de mobilité et de transport, sur place, munie tout d’abord d’un petit bridge acheté avec mes quelques économies d’étudiante parisienne. Je me déplaçais avec appréhension. C’était une expérience nouvelle que de considérer de telles questions; surtout avec l’outil photographique. Je tentais de trouver une légitimité. Et je voulais capturer cette intelligence émotionnelle qui habite les regards; la dynamique commune, tacite et entre femmes, pour se réunir, célébrer la féminité, fêter les joies et consoler les peines.
Le poids de certaines réalités de la condition de la femme en Algérie est encore présent. Le régime patriarcal. Le Code de la famille. Mais il y a une légère évolution.
D’une génération à l’autre et de tous milieux confondus, les femmes grignotent – tout en douceur, en finesse et non sans peine – l’espace qui leur est nécessaire.
À travers mes photos et ma subjectivité assumée – en tant qu’algérienne ayant vécu dans cette réalité – j’ai essayé de poser ma bienveillance en excluant tout conflit de genres. Il y a des frontières imaginaires. Tout comme des désirs de modernité et des parfums de tradition. Ce sont là des tentatives pudiques, et plus ou moins heureuses, pour transcender le quotidien.